--- from COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°256) Samedi 21/07/01 --- Pour vous abonner ou vous désabonner Perquisition musclée ____________________________________________________________ Par Laurent Jésover A minuit ce soir la police et les Carabinieri ont procédé à deux perquisitions, la première dans le Media Center, la deuxième dans l' Ecole Diaz qui lui fait face dans la petite rue Batisti. A peu près deux cent policiers sont entrés en force dans les deux bâtiments. Dans le Media Center (qui abrite aussi le secrétariat du Genoa Social Forum), ils se sont intéressés au rez-de-chaussée et au troisième étage, celui d'Indymedia. Dans l'Ecole Diaz tous les étages ont été ravagés et les personnes qui s'y trouvaient, battues et pour certaines, rouées de coups. La raison invoquée apparemment serait les aveux de détenus du Black-Block déclarant qu'ils ont trouvé leurs armes dans ces endroits. La loi italienne autorise les perquisitions « sauvages » pour deux raisons : les armes et la drogue. De fait, d' après une radio le chef local de la police n'aurait pas été prévenu, les ordres seraient venus directement de Rome. Dans l'école Diaz, le rez-de-chaussée a été ravagé, comme le reste des étages : ordinateurs détruits et brisées sur le sol, lieu de couchage dévasté, affaires répandues partout. Les portes ont été enfoncées. Les personnes qui se trouvaient sur place ont été battues. On a compté plus d'une trentaine de personnes blessées, la plupart étaient allongées sur des civières. Très peu de personnes sortaient sur leurs pieds, en se tenant toutefois la tête ou le nez qui semblait saigner. Au moins une personne était inconsciente et ne pouvait parler. A l'étage d'Indymedia, les policiers ne semblaient rechercher que des cassettes video et autres matériels du même type. Bien entendu avec violence. La police a refusé aux avocats de passer pour qu'il puisse voir ce qu' il se passe, ainsi qu'à un sénateur italien. Les rues étaient remplies de policiers et un hélicoptère tournait à très basse altitude, son projecteur balayant toutes les façades. L'une des raisons qui paraît expliquer l'action violente de la police est un reportage diffusé sur une chaine de télévision montrant les relations de certains individus du Black-Block et de la police, ceux-là recevant des ordres ou des conseils des ceux-ci. La violence inouïe avec laquelle se sont déroulés ces faits, n'est absolument pas proportionnel à la situation rencontrée par la police, puisqu'au moment d'entrer dans l'école Diaz les personnes présentes dormaient. La police, une fois évacuées les personnes par les ambulanciers, une fois avoir rempli leur van, les unités ont petit à petit quitté l' endroit. Le Genoa Social Forum fera demain matin une conférence de presse. Il serait aussi possible que des actions soient entreprises dans la journée de dimanche. Le bruit des hélicoptères et des sirènes, les cris et les uniformes ont donné, un instant durant, l'impression de vivre dans une dictature militaire. Leur brutalité a ajouté à cette impression. Plus grave encore, les pellicules photos ouvertes, les cassettes confisquées ne font qu'ajouter à cette impression, à la renforcer, puisque malgré les excuses et les raisons invoquées, il s'agissait bien de confisquer et de faire disparaître du matériel d'information. Les différents mouvements ici sont terriblement choqués. La tension monte, mais cette stratégie de la tension est aussi celle de la police depuis des jours. Elle a monté d'un cran ce soir à Gênes. Laurent Jesover. Rédacteur journal@attac.org ______________________________ G8 disqualifé par les événements de Gênes ____________________________________________________________ AU-DELÀ DES RESPONSABILITÉS DE LA POLICE ITALIENNE Le G 8 DISQUALIFIÉ PAR LES ÉVÉNEMENTS DE GÊNES Communiqué d'Attac France Göteborg n'a malheureusement pas été une exception, mais un précédent : pour la deuxième fois en moins de deux mois, le vendredi 20 juillet, la police d'un Etat membre de l'Union européenne a tiré à balles réelles sur un manifestant. Et elle l'a tué. Deux autres personnes, dont un carabinier, sont dans un état très grave et des dizaines d'autres ont été blessées. Cette explosion de violence, le Genova Social Forum (GSF), coordination qui regroupe des centaines d'organisations, dont Attac Italie, a tout fait pour la prévenir. Elle est la conséquence de trois facteurs se renforçant mutuellement, et dont les autres membres du G8 partagent largement la responsabilité avec le gouvernement italien. 1.- Tout d'abord, l'autisme de ces gouvernements face au rejet - largement majoritaire au sein de chacun de leur pays - des politiques néolibérales élaborées et/ou mises en oeuvre par les organisations multilatérales (FMI, Banque mondiale, OMC, OCDE) internationale, en Europe par la Commission européenne et le Conseil européen, et par le G 8 lui-même. Sans avoir jamais sollicité ou reçu de mandat des électeurs sur l'application de ces politiques, ces gouvernements continuent à vouloir privatiser, flexibiliser et "libéraliser" à outrance, dans le seul intérêt des transnationales et des marchés financiers. Ils créent, de ce fait, une souffrance et une violence intolérables pour une grande partie des sociétés, tant au Nord qu'au Sud. Dans ce contexte, la réunion des membres du G 8 à Gênes dans un bateau ancré dans la baie d'une ville désertée par ses habitants et mise en état de siège, constituait de toute manière un véritable défi symbolique et politique aux opinions publiques. 2. Ensuite, le comportement, que l'on ne peut même plus qualifier d'équivoque, de la police italienne qui a délibérément fermé les yeux sur la préparation et l'armement de quelques centaines d'éléments provocateurs, dits du Black Block, et sur leur passage à l'acte, parfois sous les drapeaux et avec les badges de manifestants pacifiques, sur lesquels ils avaient mis la main. Ces éléments, dont personne n'imagine qu'ils seraient inconnus des services de police en Europe, ont pu en toute impunité multiplier les agressions et les déprédations. Ils n'ont pas non plus hésité à s'attaquer à des organisations membres du GSF. Attac France s'associe à la condamnation, par le GSF, de ces éléments provocateurs et de la complaisance de la police à leur égard. L'association dénonce la tentative de criminalisation des opposants à la mondialisation libérale que traduit cette attitude. 3.- Enfin, les actions de harcèlement systématique, les multiples tracasseries et même les violences policières à l'encontre de manifestants parfaitement pacifiques, eux. Les autorités italiennes s'étaient engagées, vis à vis du GSF, à ne pas utiliser d'armes à feu. Elles ont violé cet engagement. D'une manière générale, elles ont eu recours à des moyens disproportionnés par rapport aux actions, même violentes, dont elles ont été l'objet de la part de certains groupes extérieurs au GSF. Pour exprimer sa condamnation de l'action du gouvernement italien à Gênes, Attac appelle ses militants à participer à l'action de protestation prévue le samedi 21 juillet devant l'ambassade d'italie à Paris. Les événements tragiques auxquels la première journée de réunion du G 8 a donné lieu, ainsi que la responsabilité morale à laquelle ne peuvent échapper aucun des gouvernements qui ont cru bon d'y participer, disqualifient cette institution qui se veut le directoire de la planète. La simple dignité voudrait qu'elle suspende immédiatement ses travaux. Surtout, les dirigeants doivent s'interroger sur la voie funeste de la mondialisation libérale sur laquelle ils se sont engagés, et qui ne peut que conduire à de nouveaux affrontements. Attac France demande instamment au président de la République et au premier ministre de prendre sans délai des initiatives dans ce sens. L'association continuera sans relâche, par l'information, la formation et l'action non violente à mettre en évidence les ravages de la mondialisation libérale et à ouvrir les perspectives de politiques alternatives. Nous pensons qu'un monde autre que celui dont la réunion du G 8 de Gênes a constitué la consternante caricature est possible. Attac France, Paris, Gênes, 20 juillet 2001 ______________________________ Les manifestations se terminent ____________________________________________________________ IL SECOLO XIX di Genova Le père de Carlo Giuliano " Pourquoi l'Etat a-t-il tué mon fils ?" A minuit , les carabiniers ont frappé à la porte chez Giuliano Giuliani , c'est alors qu'il a su que son fils Carlo était mort. Carlo Giuliani avait 23 ans, il fréquentait les milieux zapatistes par période seulement car c'était un solitaire Le jeune homme qui a trouvé la mort sur la place Alimonda à 5 heures du soir, avait hérité la passion politique de son père Giuliano qui avait été longtemps un militant syndicaliste de la Cgil. Puis les difficultés de la vie l'avaient quelque peu distancié de son fils; Carlo avait eu quelques ennuis avec la justice pour outrage à l'autorité et violences à agent de la force publique. Carlo qui était né à Rome avait passé sa vie à Gènes; il avait été élève du Lycée scientifique Leonardo da Vinci Giuliano Giuliani raconte que son fils étati un garçon pacifique qui ne supportait pas l'injustice, il n'appartenait à aucun groupe, il étudiait l'histoire à l'université. Giuliano Giuliani commente: " La police a laissé pendant 3 heures le champ libre aux membres des Blacks Blocks. Puis les force de l'ordre se sont attaquées à ceux qui n'en faisaient pas partie . Carlo a dû se trouver pris au milieu d'une situation qu'il n'avait pas cherchée Un camarade de Carlo , raconte :" J'ai passé avec Carlo 4 années magnifiques au Lycée Leonardo da Vinci. Nous faisions partie de Rifondazione Comunista et nous organisions des grèves et manifestations d'étudiants. Un autre ami de Carlo :"Carlo était de ceux qui veulent changer le monde, il était courageux et ne reculait jamais" Trad. D. Mendez PREMIERES REACTIONS AU MEURTRE DE CARLO GIULIANI Les organisateurs du GSF réunis à l'espace Kennedy dans la soirée du 20 juillet apres l'annonce de la mort de Carlo Giuliani , ont demandé la démission du ministre de l'intérieur et la suspension du G8 Vittorio Agnoletto le président du GSF a accusé les forces de l'ordre d'avoir préparé les conditions de la survenue d' incidents . Il a dit que la police et les carabiniers ont laissé toute latitude aux "black block" surtout allemands, britanniques et américains qui se déplacent armés jusqu'aux dents et vétus de de noir; tandis qu'ils qu'ils se déchainaient contre les cortèges pacifiques. Le leader des Tute Bianche, Casarini a raconté la manière dont les forces de sécurité ont utilisé les gaz lacrymogènes en les lançant très près du sol. Ainsi autour de la gare de Brignole ils ont chargé violemment le cortège des Tute Bianche qui était absolument pacifique . Ils tiraient les grenades très bas au risque d'atteindre les personnes De même , le cortège des LILLIPUT , dont tout le monde connaît le caractère pacifique a été lui aussi bloqué par la police , dans le seul but d' empêcher les Lilliput de rejoindre les autres groupes à la place Kennedy. Les intervenants du GSF ont tous dénoncé la stratégie de la terreur qui a inspiré la conduite des forces de police , dont l'objectif est de faire retomber la responsabilité des violences et destructions matérielles sur les organisations membres du GSF . "nous ne nous laisserons pas intimider et nous dénonçons les forces de l' ordre qui ont laissé toute liberté d'action aux Black Blocks. Nous ne nous laisserons pas piéger par le débat violence- non violence . Notre objectif de fond est clair: nous voulons remettre en cause l'idée commune aujourd'hui selon laquelle le seul monde possible est celui qui a été pensé et créé par les multinationales occidentales. Notre mouvement est non violent, nous avons dejà réussi des centaines de milliers de personnes capables de remettre fondamentalement en question l'action des grandes puissances symbolisée par le G8 Désormais , il devient difficile de faire de la politique sans tenir compte de ce nouveau mouvement international. La joie de ces jeunes gens rassemblés dans le but de s'associer à ce mouvement mondial de résistance, a été éteinte brutalement par le meurtre de Carlo Giuliani Trad. Denise Mendez LE G8 A-T-IL ENCORE UN SENS ? Les grands de ce monde réunis à Gènes se posent ouvertement la question " ces sortes de Sommet ont- ils un sens? " Il ne faudrait pas croire que la mort de Carlo soit la raison de cette mise en question . Avant même l'ouverture du G8 , Silvio Berlusconi avait prédit que Genes serait le dernier G8 sous sa forme actuelle L'UNITA écrit " c'est presque un chour, ils sont tous d'accord : Jacques Chirac souhaite revenir à des réunions informelles , il regrette le temps où il y avait 6 pays et une athmosphère plus intime". Romano Prodi rappelle " la sobriété initiale de ce type de réunion" Cependant les Grands souhaitent encore se rencontrer pour discuter, et Romano Prodi estime qu'il faut réfléchir aux modalités et aux dimensions. Le plus sévère à cet égard est Valery Giscard d'Estaing "les participants ont pris l'habitude de traiter de questions pour lesquelles ils ne sont pas qualifiés , et chacun arrive avec son communiqué final ; la volonté initiale d'échange d'opinion s'est perdue. On fait du spectacle."